[Roanne] Soutien aux revendications des prisonniers
Nous haïssons les prisons et sommes en cela bien en phase avec le collectif Papillon. Ce dernier, actif dans la région de Saint-Etienne, fait tourner la lettre de revendications des prisonniers de Roanne et un appel à les soutenir. Nous les relayons donc ci-dessous :
http://lenumerozero.lautre.net/article2401.html
http://lenumerozero.lautre.net/article2403.html
Lettre de revendications de prisonniers du centre de détention de Roanne
Nous recopions ci-dessous une lettre de revendications que nous avons reçue, écrite par des prisonniers, qui souhaitent qu’elle circule largement. Ce mercredi 25 avril, à l’occasion de la cérémonie de remise des diplômes au centre de détention de Roanne (42), ils devraient l’avoir remise aux autorités judiciaires et pénitentiaires.
Nous ferons circuler des informations plus précises dès que possible sur les circonstances et les suites de cette lettre.
Il est important que ces paroles et revendications de prisonniers eux-mêmes circulent, c’est si rare ! Alors faites tourner, et si vous le pouvez, faites entendre ces paroles dans d’autres prisons !
Les détenus qui ouvrent leur gueule et se bougent ont souvent de grandes difficultés à le faire et prennent beaucoup de risques. Ils ont besoin de notre soutien, par diverses formes que nous pouvons imaginer et qui sont en notre pouvoir…
Le collectif Papillon
« Le 25 avril 2012,
À la Direction et à la Juge d’Application des Peines,
En cette date, nous, détenus du centre de détention de Roanne, entrons en lutte afin d’exiger que nos droits soient respectés et entendus.
Vous nous obligez à rester en cellule ou dans les coursives le plus longtemps possible, là où il n’y a aucune activité pour passer le temps. Vous nous escroquez avec les cantines et les frais de télé de plus de 8 euros, par le biais de la société Eurest. Vous ne respectez pas nos droits en matière de permissions et de réductions de peine. Dans l’immédiat, nous vous informons de nos revendications.
Sport
Nous exigeons l’accès libre au gymnase et aux salles de sport. C’est l’activité la plus demandée par les détenus.
Activités
Dans chaque aile, nous avons à disposition une salle d’activités, constituée de quelques tables, chaises, aucune activité proposée ! Nous exigeons des jeux de société, échecs, dames, etc.
Nous exigeons aussi qu’il y ait plus d’activités culturelles et sportives : tournois de foot, basket, volley, pêche, etc.
Nous exigeons une réunion socio-culturelle par mois avec des détenu(e)s et des intervenants, afin d’élaborer des activités qui ne nous soient pas imposées par l’administration pénitentiaire (A.P.) ou le service socio-culturel.
Parloirs
Nous exigeons, comme le prévoit la loi européenne, que la mise à nu des détenu(e)s lors des fouilles des parloirs soit retirée. Le système de contrôle à l’entrée des parloirs est largement suffisant pour garantir votre sécurité. Par conséquent, cette fouille ne sert qu’à nous humilier et maintenir une pression psychologique et physique sur nous ! Les rondes au parloir sont aussi vécues comme une humiliation par nos familles et nous réclamons l’arrêt des rondes. En cas de problème, nous avons un interphone. Ce moyen de contrôle est abusif et conduit à une humiliation de plus !
Nous exigeons enfin les accès libres au parloir pour nos familles sans demande de permis de visite, et qu’en cas de retard, des familles qui ont souvent fait des centaines de kilomètres soient acceptées à l’entrée des parloirs et que la durée ne soit pas réduite.
Bâtiment
Nous exigeons que cesse immédiatement les mesures de quartier semi-ouvert et fermé. Tous les étages doivent être ouverts, matin et après-midi. Que l’on puisse circuler d’étage en étage, et de bâtiment en bâtiment en journée, pendant les temps d’ouverture des cellules.
Les sèche-linge et machines à laver ne doivent pas être enlevés plus d’une semaine en cas de problème. Nous vous rappelons que tous n’ont pas la possibilité de sortir leur linge : pas de famille, pas de parloir, pas d’argent, etc.
Nous exigeons la fermeture immédiate des quartiers d’isolement et disciplinaire, et autres mesures spéciales, la fermeture du prétoire [1], qui crée plus de conflits qu’il n’en règle.
Cantines [2]
Nous exigeons que la société Eurest soit remplacée par une société qui proposerait des tarifs plus bas et pas deux à trois fois le prix extérieur. Qu’il ne nous soit pas imposé un surplus de 30% sur les cantines exceptionnelles, que nous ayions les prix extérieurs. Et que les télévisions ne dépassent pas le prix de 8 euros. Nous exigeons aussi des frigos plus grands ou que le prix soit vu à la baisse.
Vie en détention
Abolition des travaux dégradants, des métiers non qualifiants et disparus à l’extérieur, ainsi que des rémunérations assimilées aux travaux forcés,
droit aux arrêts maladie et droit aux congés payés,
droit de grève,
droit à la retraite dans les mêmes conditions qu’à l’extérieur,
obligation pour l’A.P. d’assurer lors d’un transfert un emploi équivalent dans les mêmes conditions,
dédommagement par l’Etat (frais d’hébergement ainsi que des journées non-travaillées) pour les familles qui se rendent au parloir à plus de 100km de leur domicile,
plus de formations qualifiantes,
téléphone gratuit pour les indigents, l’appel aux employeurs et autres services administratifs.
Remises de peine
Nous exigeons que tous les détenu(e)s n’ayant aucun rapport et remplissant les conditions de suivi socio-judiciaire bénéficient de la totalité de leurs remises de peine et remises de peine supplémentaire, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Nous exigeons que les expertises psychiatriques soient abolies.
Nous, détenus de Roanne, exigeons d’être entendus et que nos droits soient respectés et ce dès aujourd’hui.
Lettre collective écrite et signée par tous les détenus en accord avec les revendications. »
[1] sorte de tribunal (expéditif) interne à la prison, mobilisé en cas d’incident, qui condamne les détenus à des sanctions disciplinaires, comme le placement au quartier disciplinaire (« mitard »).
[2] Cantine = système par lequel les prisonnier-e-s achètent des produits (nourriture, produits d’hygiène, de loisirs…). Ils n’ont pas le choix et doivent acheter (« cantiner ») auprès de sociétés dont les prix sont exorbitants.
Lettre ouverte à l’Administration Pénitentiaire
Il y a quelques jours, des prisonniers du Centre de Détention de Roanne rendaient publique une lettre de revendications, que vous pouvez lire en cliquant ici)
Prendre la parole de la sorte et se mobiliser ainsi est une grande prise de risque pour des prisonnier-e-s. Face à eux : les risques de brimades et sanctions de la part de l’AP et des surveillants, et le sentiment que les gens dehors n’entendent pas, ne comprennent pas, sont indifférents, voire hostiles, à leur mobilisation. C’est parce que nous détestons toutes les prisons que nous les soutenons. Ils ont besoin de solidarité, soyons imaginatifs !
Pour l’heure, et même si c’est loin d’être suffisant, voilà ci-dessous une lettre ouverte adressée à l’Administration Pénitentiaire et aux magistrats, de la part du collectif anti-carcéral Papillon.
« Monsieur,
Le 25 avril 2012, des prisonniers du centre de détention de Roanne adressent une lettre de revendications à l’administration pénitentiaire de Roanne et à Madame La Juge d’application des peines (voir texte joint). Les exigences présentées sont sérieuses. Elles portent sur :
– le quotidien de la détention (sport, activités socio-culturelles, régimes différenciés d’enfermement, exploitation de la main d’œuvre incarcérée, racket des cantines, etc.),
– l’application et l’aménagement des peines,
– l’organisation des parloirs et le respect des proches de prisonniers.
Nous appuyons ces prisonniers dans leur prise de parole pour dénoncer le fonctionnement du CD de Roanne et le système carcéral en général. Nous vous demandons de leur apporter des réponses précises et détaillée, et de les rendre publiques.
Même pour une simple lettre, les prisonniers s’exposent aux réactions arbitraires de l’Administration Pénitentiaire notamment par le biais de ses agents. Parmi d’autres, le collectif Papillon sera vigilant : nous exigeons que cette prise de parole soit écoutée et non réprimée.
Dans l’attente,
Collectif Papillon. »